C’est pourquoi nous devons consolider nos instruments de diplomatie d’influence, qui font partie intégrante de notre politique étrangère.
Je pense d’abord à la réforme de l’enseignement français à l’étranger. Le président de la République l’a rappelé avec force mardi : ce sujet, parce qu’il est au confluent de nos politiques de développement et de rayonnement culturel et linguistique, est au cœur de notre politique d’influence. Et c’est un service public essentiel pour nos compatriotes de l’étranger. Je le dis devant plusieurs parlementaires qui les représentent et savent mieux que personne l’importance stratégique pour notre pays de disposer d’un enseignement français à l’étranger performant, dans un contexte de concurrence exacerbée.
Le président de la République a fixé le cap : doubler le nombre d’élèves accueillis dans les lycées et écoles d’ici à 2030, c’est-à-dire aller au-delà de 700.000 ! Cet objectif très ambitieux, nous allons le tenir, tout en préservant ce qui fait l’excellence du système français, le socle sur lequel il est fondé : les valeurs de l’enseignement « à la française », son capital humain et son modèle pédagogique. C’est dans cet esprit que nous avons travaillé, avec Jean-Michel Blanquer au plan de développement de l’enseignement français à l’étranger.
Nous aurons l’occasion d’y revenir en détail publiquement dans les prochains jours avec Jean-Baptiste Lemoyne. Mais je voudrais d’ores et déjà attirer votre attention sur trois dimensions majeures de ce plan de développement.
D’abord, accueillir davantage d’élèves dans des conditions attractives et, pour ce faire, nous allons élargir le cercle des partenaires, au-delà des établissements actuellement homologués.
Pour cela, je souhaite que vous puissiez mobiliser, dans la diversité des situations que vous rencontrez, les investisseurs, les associations, les établissements qui vous aideront à consolider l’offre française. Sachant que, même si ses procédures seront simplifiées, l’homologation délivrée par le ministère de l’éducation nationale restera exigeante pour préserver l’excellence qui est la marque de l’enseignement français à l’étranger. Il y a déjà des expériences qui se sont organisées dans certains pays, même au Brésil. Je me suis rendu au Brésil il y a quelques jours et nous avons lancé sous le parrainage de Rai, chacun d’entre vous connait l’ancien footballeur du Paris Saint Germain, qui est le parrain de ce grand projet qui nous permettra à Sao Paulo de doubler le nombre d’élèves que nous allons pouvoir accueillir et c’est une belle réussite pour montrer qu’il arrive que nous mettions en exergue la valeur du Brésil.
Ensuite, nous allons accroître le nombre de professeurs.
Je salue la décision de Jean-Michel Blanquer de détacher dans les prochaines années 1000 titulaires supplémentaires pour l’enseignement du français à l’étranger. Mais les ressources locales devront également être mobilisées, en lien avec les établissements de formation et d’enseignement supérieur. De tels cercles vertueux ont déjà été enclenchés, je l’ai dit il y a un instant, dans certains pays mais je pense aussi au Maroc, au Liban, au Mexique et bien d’autres. Et la qualité sera bien sûr pleinement au rendez-vous. Le président de la République l’a rappelé : la formation des enseignants est la clé. La mise en place d’un master spécialisé y contribuera.
Enfin, à cet égard, nous nous donnerons les moyens de nos ambitions.
Comme je l’ai demandé, l’Agence pour l’enseignement français à l’étranger, colonne vertébrale de notre offre d’enseignement dans le monde, disposera de 25 millions d’euros supplémentaires dès 2020.
S’agissant de la réforme de l’AEFE, je tiens aussi à dire que, comme l’Etat s’y était engagé, le niveau de participation des familles aux frais de scolarité, qui avait dû être augmenté en 2017, reviendra à son niveau de 2016.
L’analyse du SNUipp-FSU HDF :
Lors de son discours de clôture à la conférence des ambassadeurs du 29 août, M Le Drian, Ministre de l’Europe et des affaires étrangères a annoncé plusieurs mesures pour accompagner la future réforme de l’EFE :
- 25 millions d’euros supplémentaires pour le budget de l’AEFE,
- 1000 postes de détachés supplémentaires,
- Retour des frais d’écolage au niveau de 2016.
Ces annonces semblent aller dans le bon sens mais nous devons les replacer dans l’évolution de l’EFE de ces dernières années : fermetures de plus de 500 postes de détachés et résidents, restrictions budgétaires suite à la baisse de 33 millions d’euros du budget de l’AEFE et multiplication anarchique des écoles partenaires.
Dans un premier temps, il convient de penser que les mobilisations successives de tous les acteurs de l’EFE (personnels, organisations syndicales, parents, élus) ne sont pas étrangères à ces décisions.
Mais pour le SNUipp, le compte n’y est pas ! La confirmation par le Président Macron de l’objectif de doublement du nombre d’élèves auraient mérité des moyens autrement plus importants. Rappelons que le rapport rendu public en 2018 de la Commission des finances du Sénat avait estimé cet objectif «pas réaliste» à budget constant, évaluant à 14% depuis 2012 la baisse des crédits publics consacrés à l’AEFE, alors que les charges ont augmenté de 19,5% entre 2012 et 2017,en raison d’une hausse du nombre des élèves (+11,4% depuis 2012) et des dépenses de personnel (+15,5%). Ces augmentations ayant pour effet une augmentation de 25% en moyenne des frais de scolarité depuis 2012.
L’augmentation de 25 millions permettra donc à peine de revenir à la situation de 2016 après deux ans de restrictions et de très nombreuses fermetures de postes plaçant les établissements dans des situations parfois très délicates sans parler des familles subissant des augmentations répétées des frais de scolarité. 1000 titulaires détachés supplémentaires soit seulement 500 de plus qu’en 2016, c’est un peu court pour multiplier les classes par 2. Sans compter qu’il s’agit de détachements supplémentaires et non de postes dans le réseau AEFE ou MLF, nous pouvons donc sans peine imaginer qu’ils serviront à alimenter les équipes des nouvelles écoles partenaires.
Quel sera le statut de ces personnels ? Auront-ils une mission spécifique visant à encadrer la formation des personnels de droit local dans les nouvelles écoles partenaires alors même que les personnels en poste à l’étranger et le SNUipp-FSU HDF réclament depuis des années d’avoir la possibilité de se présenter au CAFIPEMF ? Quelle répartition entre 1er et 2nd degré ? Les détachements et les renouvellements de détachement seront-ils facilités pour permettre un recrutement équitable quelle que soit l’origine géographique des candidats ?
Enfin sans faire de procès d’intention et même si les discours assurent le contraire, le SNUipp s’inquiète d’un possible assouplissement des règles de l’homologation synonyme de rupture de la continuité pédagogique du réseau de l’EFE afin de faciliter la création en nombre d’écoles partenaires.
Ces annonces qui seront détaillées courant septembre appellent de nombreuses questions sur leur application mais d’ores et déjà, le SNUIPP diagnostique qu’elles ne permettront pas d’assurer un service public d’éducation à l’étranger de qualité tel que les familles et les personnels l’appellent de leurs vœux tout en respectant l’objectif utopique du président Macron visant le doublement du nombre d’élèves dans le réseau.